Adolescent je ne manquais jamais l’adoration du Saint Sacrement, pendant laquelle je fixais durant des heures l’Ostensoir. Par recherche du beau, par questionnement, parce que ce rite me rassurait ? Certainement tout cela à la fois. Inconsciemment, je devais être aussi fasciné par la face sombre de cette imagerie où la souffrance est tant sublimée qu’elle en devient jouissance.

Le poids de la morale, les interdits de la religion entraient en contradiction avec mon homosexualité que je taisais encore.

Je laisse venir les images. Elles sont comme des rêves qui m’échappent et peuvent tourner à l’obsession. Un paysage, un drapé, un corps dont la tension trouve sa source dans l’art religieux occidental, de l’affliction à l’extase. L’expression d’une peur ou d’un désir, les deux se répondant.

Sur ces images en tirage pigmentaire, je viens travailler au fusain, au pastel à l’écu, toujours dans des nuances de noir. Je crée des strates, des zones d’ombre, je fais ressortir un élément. On distingue plus que l’on ne voit, je cache en même temps que je révèle.

Je souhaite que le spectateur reconnaisse certains codes esthétiques et soit saisi par l’étrangeté de mon travail qui en est un détournement, une déviation. Que de tout cela se dégage quelque chose qui soit à la fois beau et dérangeant. Comme un songe que l’on se remémore avant qu’il ne s’évanouisse, dont j’aurais gardé la trace sur une feuille de papier.